

15 décembre 2025
L’information, un bien public menacé
Mettre en commun les moyens des médias régionaux, éduquer les citoyens sur les enjeux médiatiques, contribuer à une meilleure distribution des hebdomadaires, instaurer un « infofrais » pour soutenir l’information locale, soutenir la déclaration « Ma ville appuie l’information locale » et revoir des aides fiscales dans le domaine médiatique : ce sont quelques-unes des solutions proposées par le rapport de tournée de la campagne « L’information, un bien public », de la Fédération nationale des communications et de la culture de la CSN (FNCC-CSN).
Cette campagne de la FNCC-CSN avait été mise sur pied dans le sillage de l’affaiblissement de la capacité des médias à produire de l’information journalistique professionnelle. Le cercle vicieux est bien connu : les revenus des médias ont fondu comme neige au soleil au cours des dernières années, les forçant à abolir des postes et à restreindre, par le fait même, leur capacité à produire de l’information de qualité.
Pour documenter ce phénomène, la FNCC-CSN a lancé une consultation nationale et tenu des tables de discussion à Chicoutimi, Gatineau, Laval, Longueuil, Montréal, Québec, Rimouski, Rouyn-Noranda, Sainte-Adèle, Sherbrooke et Trois-Rivières au cours de l’automne 2024 et de l’hiver 2025.
Des actrices et acteurs du milieu des médias, des propriétaires d’entreprises de presse, des élu-es, des responsables de différentes organisations sociales et communautaires et différents leaders de la société civile ont participé à ces rencontres.
Nous vous proposons un retour sur les pistes de solutions qui ont émergé à la suite de ces rencontres.
1) Mutualiser les moyens des médias régionaux
Au cours des différentes rencontres, plusieurs participants issus de plus petits médias, principalement en régions éloignées, ont soulevé la complexité de couvrir l’ensemble des sujets d’intérêt avec des équipes réduites et d’importants enjeux de déplacement et de temps.
Ils proposent une réflexion autour d’une forme de mutualisation des services, à l’image de petites agences de presse locales qui pourraient se déployer sur le terrain, au bénéfice de plusieurs médias.
2) Éducation aux médias
La nécessité de développer l’éducation aux médias a été soulevée à plusieurs reprises par des participantes et participants issus de divers horizons, indique le rapport de la FNCC–CSN.
La confusion des genres est le principal souci qui demande à être étudié : chroniqueurs versus journalistes, médias professionnels versus médias d’opinion, faits vérifiés versus sources douteuses, etc.
Les participants aux tables de discussion se sont montrés favorables à l’idée d’introduire l’éducation aux médias dans le cursus scolaire, et ce, dès l’école primaire, comme c’est le cas dans certains pays scandinaves.
Si l’on considère que l’information est un pilier de la démocratie, soutenir des citoyennes et citoyens en devenir en leur donnant les clés d’une meilleure compréhension du monde est essentiel.
3) Des municipalités qui délaissent leurs médias locaux
Plusieurs municipalités ont décidé, dans les dernières années, de ne plus diffuser leurs avis publics dans les médias locaux. Certaines se sont tournées vers les plateformes de Meta ou vers leur propre site web.
Le rapport de la FNCC–CSN indique que chaque dollar investi dans un média local se déploie dans l’économie de proximité et participe au développement régional. À l’opposé, les dollars dépensés chez Meta prennent la route de la Californie et ne reviennent jamais dans l’économie locale, ajoute-t-on.
Récemment, la Ville de Laval a retiré ses avis publics du Courrier Laval, le seul média d’information locale francophone encore disponible dans la troisième plus grande ville de la province. En décidant de diffuser les avis uniquement sur son site web, la Ville de Laval prive ainsi le média d’une source de revenus essentielle à son fonctionnement.
4) Soutenir la déclaration « Ma ville appuie l’information locale »
Le rapport de tournée de la FNCC–CSN souligne qu’on doit exiger des Villes qu’elles soutiennent leurs médias locaux afin d’assurer leur survie.
On invite les municipalités du Québec à adopter la déclaration « Ma ville appuie l’information locale », une déclaration de principe prévoyant la mise en place :
- d’une politique d’achat publicitaire responsable par la municipalité et ses organismes affiliés;
- d’allégements fiscaux et de mesures financières accordés aux médias d’information;
- et de mesures favorisant la distribution et le rayonnement de ces médias d’information.
De plus, la FNCC–CSN suggère que le Québec mette en place une réelle politique gouvernementale d’achat publicitaire. En Ontario, le gouvernement provincial exige de ses ministères et agences qu’ils allouent un minimum de 25 % de leurs dépenses publicitaires aux médias locaux; une pratique ontarienne dont le Québec pourrait s’inspirer.
5) Mieux soutenir la distribution des journaux hebdomadaires
L’abolition du Publisac a affecté plusieurs hebdos régionaux. Pour pallier le problème, plusieurs d’entre eux ont dû se tourner vers la distribution postale.
Cependant, la FNCC–CSN constate qu’il existe, chez Postes Canada, une disparité tarifaire entre les régions. Assurer un tarif unifié et préférentiel, balisé par des paramètres de poids et de taille, améliorerait la prévisibilité chez les entreprises de presse qui utilisent ce service.
6) Déployer un « infofrais » pour soutenir l’information
Au cours de sa campagne, la FNCC–CSN a proposé la création d’une taxe spécifique de 2 % sur l’achat d’appareils munis d’un écran (téléphones, tablettes ou ordinateurs) afin de créer un fonds récurrent pour appuyer le fonctionnement des médias et répondre aux défis soulevés par les déserts d’information et la lutte à la désinformation.
7) Revoir et améliorer les aides fiscales destinées au secteur des médias
La FNCC–CSN propose de doubler la déduction d’impôt relative aux achats publicitaires faits dans un média canadien. Cette mesure pourrait encourager le placement média dans des entreprises locales et nationales.
La FNCC–CSN pense que cette mesure serait plus efficace si elle était jumelée à une interdiction de la déduction relative aux achats publicitaires faits dans des médias ou des réseaux sociaux qui ne sont pas canadiens.
Enfin, la FNCC–CSN estime que Québec doit étendre la portée du crédit d’impôt sur la masse salariale des médias d’information aux salles de nouvelles radio et télé, en fonction des emplois liés au secteur de l’information. « Pour le secteur de la presse écrite, il faudrait élargir la portée du programme pour couvrir l’ensemble des emplois nécessaires au fonctionnement de l’organisation », ajoute-t-on.



