Payer plus pour moins de services, l’approche de CBC/Radio-Canada en matière d’assurances collectives

Les garanties du régime d’assurances collectives de CBC/Radio-Canada n’ont pas été revues depuis plus de 20 ans. Notre employeur a présenté, dans le cadre des travaux du Comité consultatif sur les avantages sociaux (CCAS), une proposition qui comprend plusieurs reculs en matière de couverture de médicaments et de services, mais également quelques ajouts. 

Même si l’Employeur affirme vouloir faire des changements à coûts nuls, le STTRC considère que sa proposition finale vise à réduire sa facture, et donc, par ricochet, la rémunération des employés de CBC/Radio-Canada.

Depuis 2021, notre employeur cherche à modifier notre régime d’avantages sociaux. Comme le plan est uniforme de l’Atlantique au Pacifique, un comité a été mis sur pied au sein du CCAS. Il a travaillé pendant plus de 18 mois, à huis clos, à l’insistance de l’Employeur, échangeant plusieurs propositions entre la partie patronale et les différents syndicats autour de la table.

Premier constat : près de 65% des dépenses de notre régime d’assurances collectives sont liées au remboursement de médicaments, dont la majeure partie sont des médicaments de maintenance pour des conditions chroniques.

Deuxième constat : de 50% à 55% des participants résident au Québec. L’Employeur a clairement établi deux objectifs autour de sa réforme du régime : diminuer sa facture et ajouter des services qui rendraient le plan plus « attractif » dans ses stratégies, donc de se servir des avantages sociaux comme d’un outil de marketing.

On vous propose de faire le tour de ce plan remodelé.

Une franchise revue à la hausse

La franchise actuelle du régime d’assurance est de 75 $ par personne, et de 100 $ par famille.

Au moment d’effectuer votre première réclamation de l’année civile pour des services médicaux, cette franchise est déduite de votre réclamation.

L’Employeur propose de faire passer cette franchise annuelle de 75 $ à 100 $ par personne et de 100 $ à 125 $ par famille.

Médicaments

La franchise par ordonnance est de 5 $, pour un maximum de 300 $ par année par personne, tandis que les médicaments sont remboursés à 100 %.

CBC/Radio-Canada propose de majorer la franchise à 10 $ par prescription en continuant de payer les médicaments à 100 %, pour un maximum de 750 $ par année.

Le STTRC estime que cette proposition est très désavantageuse pour ses membres. La majorité des médicaments consommés le sont pour des conditions chroniques, ce qui leur laisse peu de possibilités d’éviter ces frais supplémentaires.

En ce qui concerne la majoration de la franchise, la proposition patronale désavantage les membres du STTRC au Québec. Dans toutes les autres provinces canadiennes, les citoyens peuvent se procurer des médicaments en ligne ou par l’entremise de compagnies tierces (Costco ou Telus, par exemple) qui absorbent la franchise. Ces fournisseurs achètent au volume et bénéficient d’escomptes des fabricants et des distributeurs.

Or, cette pratique n’est pas autorisée au Québec. Donc, en vertu de cette proposition, la franchise serait de 10 $ au Québec et potentiellement gratuite dans le reste du Canada. C’est inacceptable aux yeux du STTRC.

Dans la couverture actuelle, les médicaments liés au « mode de vie » ne sont pas couverts, tout comme les fournitures pour les diabétiques, à l’extérieur du Québec. La loi québécoise oblige la Canada Vie à payer les fournitures pour diabétiques à certaines conditions. On parle ici des médicaments contre la dysfonction érectile et l’obésité.

Dans la dernière proposition de l’Employeur, les assurances couvriraient les médicaments contre la dysfonction érectile jusqu’à 1000 $ par année, et ceux pour traiter l’obésité jusqu’à 4000 $ par année.

En ce qui concerne les fournitures pour les diabétiques (moniteurs de glucose, bandelettes de test, seringues et aiguilles), elles seraient couvertes à 90 %, jusqu’à 4000 $ par année à l’extérieur du Québec. Au Nouveau-Brunswick, le gouvernement paie pour les appareils de lecture du glucose en continu à certaines conditions.

Pour les vaccins, non couverts actuellement, ils le deviendront si la couverture est approuvée par Santé Canada et si ce n’est pas couvert par le régime québécois ou néo-brunswickois. Des ordonnances seront toutefois requises.

Psychologie

Les frais raisonnables et courants nécessitent une ordonnance et sont remboursés à 90%, et ce, sans limite. Et cela couvrait seulement les psychologues.

L’Employeur propose de limiter la couverture annuelle à un plafond de 10 000 $ par personne et par année, remboursé à 90%. Par exemple, pour atteindre le plafond annuel, il faudra consommer pour 11 111 $ de services, qui comprennent les psychologues mais également plusieurs professionnels, dont les travailleurs sociaux.

Voici la liste complète de ce qui est légalement reconnu au Québec et au Nouveau-Brunswick :

  • Psycho-éducateur (au Québec seulement)
  • Psychologue
  • Psychothérapeute
  • Sexologue (au Québec seulement)
  • Thérapeute conjugal et familial (au Québec seulement)
  • Thérapeute en counselling (au Nouveau-Brunswick seulement)
  • Travailleur social

Selon Radio-Canada, 65 membres ont dépassé les 7500 $ de réclamations en 2023, avec une moyenne de 12 201 $. Ces membres auraient eu environ 1000 $ à débourser de leur poche pour accéder aux mêmes services qu’auparavant.

Une référence médicale ne sera plus nécessaire pour les soins psychologiques.

Physiothérapie

Les frais raisonnables et courants nécessitent une ordonnance et sont remboursés à 100%, et ce, sans limite.

Comme c’est le cas avec la psychothérapie, CBC/Radio-Canada propose de diminuer le taux de remboursement à 90 % et de plafonner la couverture annuelle à 6500 $.

Vision

L’Employeur paie un examen de la vue par année civile et 240 $ pour des verres de contact ou des lunettes par période de 24 mois. Ces garanties n’ont pas été revues depuis plus de 20 ans. Et franchement, le montant remboursé est ridiculement bas par rapport à l’évolution de la facture pour les soins visuels. Les gens qui ont des verres progressifs peuvent en témoigner.

La proposition de CBC/Radio-Canada comprend toujours le remboursement d’un examen par année civile et ferait passer le remboursement à 400 $ par période de 24 mois. En d’autres mots, CBC/Radio-Canada hausse cette garantie de 80 $ par année.

L’Employeur accepte aussi de rembourser la même somme de 400 $ pour une chirurgie de correction de la vue au laser, ce qui n’est pas remboursé dans le régime actuel.

Autres services paramédicaux

La chiropractie, la massothérapie, l’acupuncture, l’ostéopathie, la naturopathie et les podiatres sont couverts à 500 $ par année, payables à 100 %.

Si cette garantie avait été indexée à l’inflation depuis 2005, elle ne serait pas de 500 $ par année civile mais de 768,94 $, selon le calculateur d’inflation de la Banque du Canada.

Encore une fois, pour parler en langage financier, la garantie de 500 $ pour les autres services paramédicaux permet à nos membres de faire pas mal moins de chemin qu’il y a 20 ans. Par exemple, les frais courants couverts pour nos membres au Québec en 2025 pour un chiro sont de 70 $ par visite. Ainsi, une indexation de la garantie à 768,94 $ permettrait de couvrir presque quatre visites supplémentaires.

L’Employeur propose de payer à 100 % ces six services pour un total de 1500 $ par an, combinés.

Ainsi, on passerait de six services couverts pour un total de 3000 $ (500$ par service) à six services combinés pour un total de 1500 $.

Il y a un élément de flexibilité dans cette proposition : la plupart des membres ne vont pas au maximum de chacune des catégories; ils atteignent le maximum d’un ou deux services. Et maintenant, ils pourront aller jusqu’à 1500 $ pour un des services.

Deux ajouts aux services couverts

CBC/Radio-Canada veut ajouter deux services qui ne sont pas couverts dans le régime d’assurances collectives actuel : 

  • Traitement de fertilité (5000 $ / maximum à vie);
  • Affirmation de genre (10 000 $ / maximum à vie).

Qu’est-ce que cela signifie pour l’ensemble de la proposition de CBC/Radio-Canada?

L’Employeur n’a aucunement l’intention d’améliorer sa proposition. Au fil des discussions, CBC/Radio-Canada s’est montrée très rigide; seuls les syndicats ont été contraints de revoir leurs demandes à la baisse.

En ce qui concerne les plafonds imposés aux différentes garanties, la logique derrière les propositions de l’Employeur est double.

CBC/Radio-Canada veut diminuer sa facture en matière d’avantages sociaux et, ensuite, utiliser une partie de ces économies faites sur le dos de ses employés pour financer des services qui, à son avis, la rendront plus attractive pour de futurs employés. Donc, ce régime revu (et réduit!) devient un outil marketing pour attirer de futurs employés, mais ne s’inquiète pas de retenir les employés actuels.

De 2010 à 2019, les membres du STTRC ont laissé chaque année 0,1 % de leurs ajustements salariaux pour financer la création d’un Fonds de soins de santé dont le principal mandat était de contrebalancer une hausse qu’on craignait trop rapide des coûts des médicaments. Cette hypothèse ne s’est jamais matérialisée. CBC/Radio-Canada a pigé à une seule reprise dans ce fonds, soit 108 801 $ en 2019.

Aux derniers états de compte, la cagnotte du Fonds de soins de santé comprend 50,1 millions de dollars, une somme qui devrait être utilisée pour garantir un bon régime d’assurances collectives aux membres du STTRC. CBC/Radio-Canada n’a jamais dit comment elle allait utiliser cette somme.

Le STTRC conteste par voie de grief la transparence sur la façon dont les sommes sont investies et le coût réel du régime d’avantages sociaux.

Tout au long du processus de révision du régime des avantages sociaux, CBC/Radio-Canada n’a jamais accepté de fournir les données réelles d’utilisation du plan d’assurances pour qu’on puisse constater les coûts réels mais aussi faire une évaluation des coûts à venir.

De plus, les nouveaux montants maximums proposés sont fixes. Comme il en a l’habitude, notre Employeur pellette ses problèmes par en avant et mise sur le fait que personne ne voudra se pencher sur cette partie importante de notre rémunération avant 20 ans.

Les avantages sociaux sont une composante importante de la rémunération. On le voit, avec cette proposition, CBC/Radio-Canada veut faire reculer la paye de ses employés.

Réunis le 15 octobre, les membres du conseil syndical du STTRC ont proposé à l’unanimité de recommander le rejet du plan proposé par l’Employeur et de prendre les moyens nécessaires pour s’y opposer.